Dessert amer

[NLR : Dans le cadre d’une récente formation avec Bernadète Bidaude, cette dernière nous a proposé de pasticher une recette pour exprimer un sentiment ou dénoncer quelque chose.  Le jeu étant trop tentant, je m’y suis laissé prendre.  Alors que mes collègues y sont allé de Bouillon de colère, Caresses de soleil, Gigot de nostalgie, Tsunamitsu de la peur et autres Gâteau Blockbuster (façon Hollywood),  j’ai choisi de me défouler d’une frustration latente en concoctant un dessert dont je préférerais pourtant que l’on se passe collectivement.  À noter avant qu’on ne me jette des pierres : Il m’est sans doute arrivé de le cuisiner à l’occasion, mais je tente désormais de l’exclure de mon régime…]

Clafoutu du conteur ou Bagatelle facile
(aussi appelé Tir-au-flanc mou)

Pourquoi se casser la tête pour créer de nouvelles histoires de qualité, alors que ce pourrait souvent n’être qu’une bagatelle ? Avec ce dessert sucré, facile et rapide, vous satisferez les plus gourmands, mais peut-être pas les fins gourmets…

Ingrédients

2 ou 3 textes émiettés sur le coin de la table la veille
50 grammes d’auto-congratulation fondante

2 l d’inconscience
1 t de paresse
1 c. à plein de soupe de zeste de prétention
Jus d’1 grand besoin de reconnaissance très pressé
1 sachet de gloire instantanée
3 vœux entiers avec les coquilles

3 à 4 histoires pas trop mûries
1 pincée Moi-je-rêve

Humour en poudre
Flocons de bons sentiments
Des digressions du moment
½ t de crème à fouetter très légère
Blancs de mémoire battus en niaise
Quelques blagues salées (facultatif)

(Absence de) Préparation

Dans un cul-de-poule, incorporer la paresse dans l’inconscience. Y ajouter en brassant le zeste de prétention, le besoin de reconnaissance, la gloire instantanée et les vœux entiers.  (Ne surtout pas casser les vœux, parce que ça ferait de l’omelette.)

Enlever les têtes, les cœurs, les graines, la pelure, la charpente et les queues des histoires pas mûres.  Il ne doit rien rester à se mettre sous la dent.

Passer au mélangeur les histoires sans queue ni tête avec les autres ingrédients et le Moi-je-rêve, jusqu’à obtenir une compote. Ne pas rendre trop lisse.

Écrémer l’auto-congratulation et y incorporer les textes émiettés. Tasser au fond d’un tout petit moule pré-formaté. Verser la compote d’histoires sur ce crumble de textes.

Se reposer, mais ne surtout pas laisser reposer le mélange.  Entrecouper de blancs. Préparer un four. Laisser mourir d’ennui à petit feu moins de 10 minutes.

Saupoudrer de beaucoup d’humour et de bons sentiments, en parsemant de bouquets de digressions à l’intention du public, sans quoi le clafoutu pourrait être insipide.

Garnir abondamment de crème fouettée pour la légèreté. Décorer de blagues salées au goût (douteux).

Peut se servir réchauffé (mais surtout sans échauffer le corps ou la voix).

Pourvus que vos convives ne soient pas trop connaisseurs, vous réussirez cette bagatelle à tout coup.  Ne pas en servir trop souvent; même les publics les plus indulgents se lassent des plats faciles.

Une réflexion sur « Dessert amer »

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