Stories We Tell: la cinéaste Sarah Polley pose de bonnes questions

Comme plusieurs, j’ai été profondément touché par Stories We Tell (Les histoires qu’on raconte, 2012) de l’actrice et réalisatrice canadienne Sarah Polley (Away from her, Take This Waltz).  Ce film qui mêle entrevues, films d’archives et reconstitutions est pressenti pour une nomination comme meilleur documentaire aux Oscars.  On peut le télécharger (en payant) à partir du site de l’Office national du film.

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La cinéaste Sarah Polley

L’histoire familiale exceptionnelle racontée m’a plu, mais ce sont davantage les questions que le film pose aux conteurs, auteurs et fabulistes de tout acabits qui m’ont intéressées.  Des questions particulièrement pertinentes pour ceux qui racontent des récits de vie ou des contes historiques.  Polley montre bien que chaque personne qui raconte, même avec les meilleurs intentions, a sa propre version de la réalité.  Sitôt qu’on ne met à raconter, il n’y a plus une seule histoire, mais une multitude de récits qui peuvent se contredire.  La cinéaste explique (en anglais) sa démarche sur le blogue de l’Office national du film.

Parfois, considérer qu’« en tant qu’artiste, nous avons tous les droits de nous approprier une histoire réelle pour en faire une création » ne suffit peut-être pas. On pourrait se demander…

  • Quand est-ce qu’une histoire personnelle devient universelle?  Comment?  Que faut-il faire pour éviter les pièges du narcissisme et du voyeurisme?
  • Qui a le droit de raconter une histoire vécue?  Uniquement ceux qui l’ont vécu au premier chef?  Ceux qui étaient proches des événements? Tous ceux qui trouvent cette histoire intéressante?
  • Lorsque l’histoire est racontée par un tiers, est-ce que ses protagonistes originaux ne s’en trouvent pas « dépossédés » en quelque sorte?  Ne vaut-il pas mieux obtenir l’autorisation?  Et si on nous la refuse, mais que nous sentons comme artistes que cette histoire doit être racontée?  Est-ce que changer quelques noms de personnes et de lieux suffit?
  • Même quand celui ou celle qui raconte parle de son propre vécu, comment est-ce que cela affecte ses proches?  Ceux qui vivent autour du conteur, de la conteuse, qui ont été affectés par ce vécu?

Plusieurs de ces questions avaient été abordées par la conteuse et comédienne Isabelle Gosselin pendant l’atelier Collectes de mémoires orales que j’ai suivi au début 2013 à la Maison des arts de la parole.

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