Tenir conte

Erreurs et précipitation…

[L’amie Alice est de retour de Martinique.  Par ses textes, elle continue de nous entretenir de ses expériences de conteuse là-bas. JSD]

J’écris vite et je suis émotive. Pas de quoi fouetter un chat, mais de quoi écrire des bêtises, oui. L’article « De la culture créole en pays créole » (titre un peu pompeux lié aussi à la précipitation) a suscité des commentaires de la part de mes amis Martiniquais, lesquels ont mis en lumière quelques erreurs dont j’aurais pu me passer si seulement j’avais été plus patiente, attentive et avisée… Sans le vouloir, j’ai fait ma « maudite française », ention et damnafer ! Moi qui déteste me voir dans ce miroir-là.

Mea Culpa donc, et je reprends depuis le début :

Qu’est-ce-que je faisais là-bas en Martinique ?  J’étais en résidence artistique « Arts de la Parole » pour un mois, afin d’écrire un spectacle (thème : « la cuisine dans le conte »…). J’y avais été invitée par l’association Martiniquaise VIRGUL’, conventionnée par la Direction des Affaires Culturelles, et à l’instigation de son directeur artistique, Valer’EGOUY, conteur, comédien, homme de scène et organisateur… Rencontré au festival « Les jours sont contés en Estrie » 2011…  À Sherbrooke !  Le monde du conte est à la fois immense et petit !

Grande aventure, et gros projet personnel que ce voyage pour moi qui n’y connaissais rien à la Martinique, n’ayant jamais posé un orteil sur aucune terre des Antilles Françaises. Pas plus de connaissances historiques, les manuels d’Histoire français étant comme par hasard très discrets sur la pourtant longue période esclavagiste du pays, comme je le disais précédemment.
J’ai donc tout découvert sur le tard et « sur le tas ». Et quand je dis « tout », bien entendu, c’est relatif : en un mois, j’ai seulement effleuré la surface de certaines choses… Et j’ai éprouvé des chocs, dont celui décrit dans l’article sur la culture créole. Article que j’ai écrit immédiatement après ma rencontre avec des enfants de sixième. Grosse erreur ! J’étais dans l’émotion. Je suis allée vite. Je ne l’ai pas non plus fait relire par mes amis Martiniquais, ce qui aurait pourtant été du domaine de l’élémentaire. Je venais d’arriver ou presque, j’étais terriblement excitée, et même presque anxieuse !

Il y a donc quelques rectificatifs à apporter, et les voici :

J’ai parlé d’une amie dont j’ai dit qu’elle était « béké ». Elle a rectifié : « Pas béké ! Blanche créole. ». Les békés étaient les riches propriétaires blancs esclavagistes. Mon amie est issue d’une famille de travailleurs blancs pauvres, exploitant des terres arides où l’agriculture était rare et difficile. Nuance importante.

J’ai dit également que cette amie enseignait le créole de son propre chef. Pour le bémol, je préfère lui laisser la parole :

Je n’enseigne pas le créole de mon propre chef et je n’enseigne pas dans les deux langues. Les Antillais se sont battus pour que l’enseignement de cette langue soit reconnue par l’Etat Français et sont fiers d’avoir enfin gagné. J’ai l’habilitation pour enseigner le créole comme langue régionale. Cette habilitation est un examen reconnu par l’Education Nationale. Je n’enseigne pas les autres disciplines en créole même si j’utilise la langue maternelle de mes élèves pour leur expliquer certaines différences ou ressemblances (travail sur les créolismes par exemple). En LCR (langue et culture régionale), j’enseigne comment parler (sans pudeur et gêne) le créole qui est une langue riche et splendide, comment le lire et l’écrire. Je leur fais aussi découvrir leur culture et leur histoire avec tous les évènements historiques liés directement à la Martinique (faits historiques que l’on ne trouve pas dans les manuels d’histoire scolaires).

Voilà… Je m’excuse donc pour toutes ces erreurs et approximations. Ça m’apprendra à réfléchir avant d’écrire ! Mais c’est une bonne leçon. Quant au choc qui m’a secouée au début de mon séjour, à savoir le fait que les enfants ne connaissaient pas forcément les contes de leur culture maternelle, je reste dessus, même si depuis, je l’ai tempéré… Notamment grâce à la suite du séjour et aux rencontres avec les autres artistes.

Moralité ou épilogue ou conclusion… J’ai pas tout vu, j’ai pas tout compris… Loin de là. Mais j’ai été happée, chamboulée, remuée, choquée, épatée, emballée et émerveillée.  Voilà au moins ce que je peux dire en étant sûre et certaine de ne pas dire de bêtises…

Alice Duffaud

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